Blogue TUF Nations d'Olivier Aubin-Mercier : Épisode 12

Cette semaine, on a eu droit au défi des entraîneurs. En arrivant sur place, c'était évident que nous allions avoir un défi de bûcheron. Je n'en suis pas certain, mais je crois que Patrick avait eu vent de rumeurs à ce sujet et qu'il s'était préparé en conséquence. De ce que j'ai entendu dire, il aurait fait des recherches sur Internet afin d'apprendre les bonnes techniques pour scier du bois. Mais en même temps, on s'attendait à ce genre de défi aussi. Ou bien ils allaient bûcher du bois, ou bien ils allaient faire une course en traîneau à chiens etc. Nous étions persuadés qu'il s'agirait d'un genre de défi à la sauce canadienne. Je veux dire, je ne pensais pas qu'ils auraient emmené un kangourou pour faire de la boxe avec nous! Dans cette optique, il n'y avait pas un million de possibilités.

Malgré tout, ça ne voulait pas dire du tout que nous avions un avantage. Je doute que Pat Côté aille lancer des haches sur une cible tous les jours, ni tirer à l'arbalète. Les deux premiers défis étaient pas mal égaux. Quant au troisième, Patrick l'a remporté, mais ça ne veut rien dire. Je suis Québécois et je n'ai jamais scié un tronc de ma vie, pas plus que je ne pense le faire d'ailleurs. Patrick s'est montré assez compétitif dans les circonstances, quoique je dirais que c'est assez difficile de ne pas être compétitif quand il y a 20 000$ en jeu au bout.

Cette journée-là s'est terminée avec un énorme méchoui de viandes sauvages. Je me souviens que Nordine était vraiment contre ça. Quand il était entré dans la maison et avait vu tous les animaux empaillés, dont des bébés ours et des bébés loups, il n'avait pas particulièrement apprécié. C'est un homme qui aime beaucoup les animaux et il ne comprenait pas qu'un chasseur puisse prendre plaisir à tuer un bébé animal pour ensuite l'empailler. Dans un sens, on se dit que le chasseur consomme sa viande, mais dans l'autre, était-ce vraiment nécessaire de chasser un bébé animal? Disons que sur ce point, je le rejoins. Conséquemment, Nordine s'est montré un peu moins enjoué que les autres. Il n'a d'ailleurs pas consommé de viande. Il a dû manger les portions de légumes laissées par Rich! En temps normal, se retrouver dans un gros festin en pleine coupe de poids, ça n'aurait pas été l'idéal, mais dans le cadre de TUF, comme je suis assez petit pour un 170 livres considérant mon poids naturel, je n'avais pas réellement de soucis à me faire. J'ai pu manger avec bonne conscience.

Fait cocasse de cet épisode, on voit Kajan aller vandaliser les photos des Australiens dans les vestiaires en compagnie de Luke. Aussi difficile est-il de le croire parce qu'il est d'un naturel plutôt calme et mature, c'était l'idée de Luke! Il faut savoir que c'est lui le véritable "mastermind" des mauvais tours au sein de l'équipe canadienne. Si ça peut en rassurer certains, ce n'était pas lui qui avait dessiné le phallus près du visage de Brendan. C'était assez drôle. On avait nommé ça "The war of the dicks". À la télévision, ils n'en ont montré qu'une partie. On voit Kajan terminer son dessin, mais ils ne montrent pas que les Australiens étaient aussi venus en faire autant dans notre vestiaire, ce qui avait poussé Kajan à retourner une seconde fois dans leur vestiaire dessiner un pénis géant avec un chapeau de cowboy. Et le "prank" s'est échelonné sur plusieurs jours.

Cette semaine-là, c'était l'anniversaire de Richard et je m'étais affairé un bon matin à découper une quantité phénoménale de confettis en forme de pénis avec un chapeau de cowboy et Brendan m'avait pris sur le fait. Pour une raison que j'ignore, il n'était pas allé à l'entraînement avec les autres. J'étais assis en bas à la cuisine et je découpais tout en chantant "Dick, Dick, Dick, Dick…" sur un air joyeux. Il avait été réveillé par le bruit et il était descendu en toussotant afin de me signaler sa présence. Je me suis retournée tout en étant pris d'un fou rire. J'avais mis ces confettis dans un sac ziploc de façon à ce que Richard reçoive une pluie de pénis en ouvrant son casier. Et ça avait fonctionné à merveille.

J'avais fait le coup à Richard, mais comme il m'avait vu, je pense que Brendan a été persuadé pendant un moment que c'était moi qui avais fait le dessin sur sa photo. Il est assez soupe au lait. On a pris un malin plaisir à le narguer pendant plusieurs jours. Ce n'était pas tant la blague des pénis qui était drôle plus que sa réaction totalement démesurée. On ne comprenait pas pourquoi ça le mettait en furie. C'était une blague tout ce qu'il y a de plus enfantine. Il faut comprendre que pendant toutes ces semaines, on n'avait absolument rien à faire dans la maison. Tout était un bon prétexte pour se désennuyer, quitte à devoir dessiner des pénis. Au départ, cela ne venait que de Luke et Kajan, mais quand on a vu la réaction de Brendan, tout le monde a commencé à en faire. Brendan avait lancé une vaste enquête et encore avant aujourd'hui, je ne sais pas s'il a fini par découvrir qui étaient les véritables coupables! Tout ça s'est échelonné sur une plus longue période qu'on ne le croit. À vrai dire, c'était bien avant mon combat. Je ne sais même pas si ça n'a pas commencé avant le combat de Luke!

Pour se venger, les Australiens ont décidé de s'en prendre à notre original en peluche. Quand nous sommes arrivés au vestiaire et que nous avons découvert ce qu'ils avaient fait, c'était hilarant. Il y avait une peluche complètement scalpée, la tête coupée. C'était presque surréel. L'idée de s'en prendre à notre mascotte pour se venger était bonne, mais il y a eu un dérapage certain. La façon dont Brendan faisait le geste de trancher la gorge de l'original pour ensuite l'étriper à coup de couteau, c'était digne du film "Psycho".

L'UFC a maintenant révélé l'existence de mon surnom "The Québécois Kid". Je ne suis même pas certain d'où ça vient. Je crois que c'est Chad et Kajan qui avaient lancé ça à la volée en disant que ça m'irait bien. Sur le coup, j'ai trouvé ça un peu "kétaine". À vrai dire, je pense encore que ce l'est! On verra ce qu'il adviendra de ce surnom. Je ne m'en fais pas trop avec ça. Si les gens n'aiment pas, je vais tout simplement laisser faire. Je m'en fou un peu; je n'y tiens pas particulièrement. Et ça ne m'intéresse pas non plus de me trouver un surnom moi-même.

En entrevue cette semaine-là, je pouvais donner l'impression d'être une personne plutôt monotone dans la vie, mais ce n'est pas le cas. Il faut savoir que je devais toujours tourner mes prises dans les deux langues. Ça explique le fait que je parle un peu comme un robot. À la limite, je dirais même que comme nous tournions le passage en français en second, c'était ce dernier qui était le plus difficile à faire. Il fallait que je dise non seulement la même chose, mais que je le fasse aussi dans le même temps donné et cela me demandait une bonne dose d'effort et de concentration. Nordine passait par le même processus que moi, mais ça paraissait beaucoup moins. Quand je m'écoute parler, je trouve que j'ai l'air d'un gars qui a un grave problème de… appelons ça un problème de se faire des amis! Dire qu'à la base, je craignais d'avoir l'air d'un véritable attardé quand on allait m'entendre parler en anglais. Et finalement, ce n'est pas si pire. Ils ont fait une belle job de montage!

Cette semaine, j'affrontais Rich et je crois que l'analyse qu'il a faite de moi était assez juste. C'est vrai que ma force, c'est de prendre le dos de mes adversaires pour leur passer l'étranglement arrière. Il n'a pas négligé non plus le fait que j'étais gaucher. Disons que j'ai l'impression qu'il a fait une bonne préparation pour m'affronter. Il n'a pas fait de camp d'entraînement normal comme ceux que les combattants font à l'extérieur puisqu'il n'avait appris qu'il allait m'affronter qu'après mon combat contre Jake. Mais on ne parle quand même pas de deux mois de préparation. Quoique je me suis entraîné dans les mêmes circonstances que lui, je n'ai pas bénéficié de plus de temps pour compléter la mienne.

De mon côté, je m'étais beaucoup entraîné avec Nordine. D'ailleurs, on l'entend parler de moi et on sent tout de suite qu'il a la fibre d'un coach. Je lui dis souvent qu'il ferait un excellent entraîneur. Il a ça en lui. C'est drôle, car tout au long de l'aventure, il me coachait dans à peu près tout, voire même jusque dans la cuisine! Il faisait pareil avec Kajan. Je repense notamment au défi Forza XBox One où tout le long, il le corrigeait sur sa façon de conduire. Je crois que c'est tout simplement plus fort que lui.

Je suis toujours surpris d'entendre quelqu'un parler de mes mains comme Patrick Côté le fait. Peut-être que je me sous-estime moi-même, mais j'ai l'impression de ne pas être encore tout à fait à l'aise avec les petits gants. Je suppose que c'est le genre de chose qui va venir avec l'expérience. Quant à Sheldon, qui a dit que je le démolirais si nous devions nous battre un contre l'autre, j'ai trouvé ses commentaires plutôt flatteurs, surtout qu'il est plus gros que moi. Luke m'a plutôt comparé à Dexter. Et ce n'est pas la première fois que je l'entends celle-là! Apparemment que j'aurais des ressemblances physiques avec Dexter. J'ai moi aussi un petit côté sombre. Avant un combat, je change de personnalité. Je ne parle pas, je ne regarde personne, je suis vraiment dans ma tête. Je crois que c'est quelque chose que les gens ont remarqué. Je demande aussi aux gens autour de moi de rester calme pendant un combat, de ne pas se surexciter, de ne pas applaudir, ni rien faire… Je n'aime pas trop penser. Je n'aime pas non plus que les gens me collent avant un combat. Je veux qu'on respecte ma bulle.

Avant le combat, nous avons appris que Richard était un combattant qui faisait beaucoup de visualisation. C'est assez intense quand il l'explique, mais aussi très intéressant. Tout ce truc de Georges St-Pierre dans la télévision qui se change en lui-même…

Parlant de Georges, Patrick explique que je ne suis pas le prochain GSP, mais plutôt le premier Olivier Aubin-Mercier. Je dois avouer que ça me tanne qu'on me compare à lui. Premièrement, on n'a pas le même bagage. Et ce que Georges a accompli est vraiment incroyable et pas du tout comparable à ma jeune carrière. Je pense que les gens ont besoin de quelqu'un d'autre dans leur esprit pour remplacer Georges, d'autant plus depuis qu'il est parti, mais je ne pense pas être cette personne-là. Il n'existe pas toujours une personne pour en remplacer une autre. Je pense qu'un athlète comme Georges, c'est quelque chose qu'on voit tous les 20-25 ans. Et même si je devais avoir une carrière phénoménale plus tard, je trouve que c'est prématuré de le prédire. Je sais que les gens qui se créent des attentes seront déçus : je ne suis pas Georges St-Pierre. Ce qu'il a accompli est incroyable. Si dans ma carrière, je peux accomplir ne serait-ce que la moitié que ce qu'il a fait dans la sienne, j'en serais plus qu'heureux. À mon avis toutes ces histoires de comparaisons, ce n'est que de la presse à sensation.

Puis est venu le temps de mon combat contre Rich. Lors des premières 30 secondes, il s'est montré assez hargneux. Je me suis fait frapper "flush" deux ou trois fois. Contre Jake, j'avais toujours bloqué les coups en totalité ou en partie, mais Richard lui a vraiment percé ma garde. Et peut-être était-ce à cause de l'adrénaline, mais en dépit du fait que j'ai senti les coups rentrer à pleine puissance, je n'ai pas trouvé que ça faisait plus mal. De mon côté, j'avais l'impression pendant l'affrontement de l'avoir touché assez solidement, mais en revoyant le combat à la télévision, je ne trouve pas l'avoir tant frappé que ça. J'étais pourtant certain de l'avoir touché pas mal plus qu'il ne me l'avait rendu. Disons que je me serais attendu à plus de réactions de sa part. On voit à peine sa tête reculer légèrement vers l'arrière. Un peu décevant.

J'ai fait quelques petites erreurs debout, mais dans l'ensemble je trouve que j'étais plus "là" que lors de mon combat contre Jake. J'ai été surpris d'être capable de contrôler Rich grâce à ma force physique, car à la base, il semble beaucoup plus massif que moi. Je dirais même qu'il a l'air à première vue d'un gars qui se bat dans une catégorie plus élevée que moi. J'ai essayé de le mettre en mauvaise position et finalement, au moment où il a perdu pied, j'en ai profité pour grimper sur son dos et lui passer l'étranglement. Il n'a pas su résister. Je crois qu'il s'attendait au "half nelson" comme je l'avais tenté quelques fois sur Jake, c’est-à-dire que je poussais sa tête vers le bas quand Jake essayait de se relever. Mais quand j'ai essayé de faire la même chose à Rich, il a voulu le contrer en levant le menton et c'est à ce moment que j'ai décidé de changer de technique pour aller directement avec l'étranglement arrière.

La différence entre Jake et Richard, c'est que Jake n'avait essayé que de défendre la soumission, sans tenter de s'enfuir. Il n'essayait que de survivre. Richard essayait pour sa part de se déprendre. C'est très facile de ne pas faire d'erreur si tout ce qu'on essaie, c'est de ne pas se faire soumettre. Ce qui est difficile, c'est de rester proactif, de tenter de s'enfuir et de le faire tout en défendant la soumission et ce, sans se compromettre. Or, en prenant des risques, c'est là qu'on commet le plus souvent des erreurs. Et c'est exactement ce que Richard a fait. Ça m'a donné l'ouverture nécessaire pour le finir.

Après le combat, on m'entend dire que Rich m'a explosé le genou. Je tiens à vous rassurer, ce n'était qu'une petite bursite accompagnée d'une légère infiltration d'eau qui créait une pression dans mon genou. C'est totalement bénin, je n'en souffre plus et cela ne m'empêchera pas de participer à la finale. Ça m'a tout simplement donné l'impression pendant deux jours que quelque chose voulait sortir de mon genou quand je le pliais. Comme l'a dit le médecin, la douleur ressentie laisse présager une blessure grave alors que ce n'est pas le cas et que ça se résorbe tout seul après quelques heures. Le lendemain, je jouais déjà au hockey avec la gang.

Au vestiaire après le combat, il y a eu une poignée de main entre moi et Chad. C'est certain que je devrai maintenant affronter un coéquipier, mais au moins, je n'aurai eu qu'à en affronter qu'un seul au cours de l'aventure. Au moment de quitter la maison TUF, je ne pensais même pas à ça. À vrai dire, ça m'a pris un bon mois pour retomber sur mes pieds en revenant chez moi. Après ces petites vacances, je me suis mis à repenser à mon combat. Pour le reste, j'essaie de ne pas trop me casser la tête avec ça. Ce sera un combat comme les autres.